L’escargot bleu

de Jérémie Fassole

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Il était une fois, sur une toute petite planète d’une galaxie voisine de la Terre, un peuple de petits lutins gentils et espiègles, et très gourmands. Ils vivaient dans la bonne humeur perpétuelle, passant leur temps à se faire des farces les uns aux autres, tout en apprenant les choses de la vie. Et comme ils étaient très décontractés et curieux de tout, ils apprenaient beaucoup et très vite, en sorte que n’importe lequel d’entre eux, en sortant de l’enfance, connaissait tout sur la géographie, les plantes, les étoiles du ciel, la musique et la danse, les mathématiques, et même un peu de magie, ainsi que l’art d’apprendre les langues étrangères.


 

 

 

 

 

 

 


 

 

Ils savaient même parler aux animaux. Car il y avait aussi des animaux sur leur planète, toutes sortes d’animaux inconnus sur la Terre, mais aucun animal méchant ni même carnivore, et tous ces animaux vivaient en harmonie ensemble. Comme les lutins savaient leur parler dans leur langue, quand une dispute survenait entre eux, ils demandaient naturellement aux lutins de faire les arbitres et leur mésentente trouvait une solution amiable. Il est vrai que, comme tous étaient végétariens, cela facilitait les relations.

 

 

Parmi ces animaux, certains étaient plus familiers que d’autres, comme chez nous, nos chiens, nos chats ou nos chevaux par rapport aux biches, castors ou ouistitis vivant à l’état sauvage.

L’animal le plus familier des lutins, qui était leur compagnon le plus précieux, celui de tous les jours, était un escargot. Attention, pas n’importe quel escargot !... Un escargot énorme qui, par rapport à la taillle minuscule des lutins aurait été pour nous, humains, gros comme un éléphant. Que dis-je gros comme un éléphant, je devrais dire comme dix éléphants ! Il était tellement grand que les lutins avaient l’habitude d’habiter à l’intérieur de sa coquille. C’était bien pratique pour voyager confortablement car en y pratiquant quelques ouvertures, on pouvait se faire un spacieux appartement de plusieurs pièces, avec tout ce qu’il faut pour manger, dormir et voyager.

Une petite ouverture sur le devant de la coquille permettait de diriger l’escargot depuis l’intérieur au moyen de rênes qui allaient jusqu’aux cornes de l’animal.

En gros, si l’on peut dire, il ressemblait à un escargot de chez nous, avec toutefois deux différences importantes : il était bleu, et il pouvait voler...

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Les lutins vivaient heureux sur leur planète, mais quelquefois, ils s’ennuyaient. Alors, ils inventaient de fabuleuses parties de cache-cache qui duraient des jours, ou ils se réunissaient sous un grand arbre et écoutaient un montreur d’étoiles leur conter des histoires fantastiques qui les faisaient rêver.

Un jour, quelques-uns d’entre eux, qui venaient d’entendre un conte se passant sur une planète bleue eurent envie de vivre vraiment une aventure semblable et se mirent en quête d’une planète bleue. Comme ils connaissaient bien la carte du ciel, ils virent très vite qu’il existait pas loin de chez eux, une petite planète bleue, et après quelques jours passés à faire des provisions pour le voyage, ils montèrent dans la coquille de leur escargot et s’envolèrent pour la Terre...

 

 

***

Il faut maintenant que je vous présente les membres de cette équipée : ils n’ont pas vraiment de chef, car chez les lutins il n’y a pas de chef. Simplement, le meilleur en pilotage d’escargots, fut naturellement le responsable du voyage. On l'appellera Pilotin parce que son vrai nom est imprononçable pour nous. Montreur d’étoiles fit la navigation, Gourmette s’occupa des provisions de haricots indispensables pour la durée du voyage, et Magibus de la bonne santé et du moral des voyageurs. Ils étaient donc quatre à débarquer chez nous ce matin là...


Le voyage depuis leur planète jusqu’ici ne leur avait pas pris longtemps car en chemin ils avaient rencontré un ange qui leur avait indiqué un raccourci. Bref, un beau matin, l’escargot bleu se posa parmi les brins d’herbe d’une prairie, au milieu d’une belle et vaste clairière. Les lutins ouvrirent les volets de la coquille et regardèrent autour d’eux : l’herbe était haute et tout leur semblait géant. Une légère brise courait sur la prairie et l’air était chaud. C’était l’été.

Les lutins trouvèrent cela agréable et pensèrent que c’était toujours comme cela sur la Terre, car ils ignoraient le cycle des saisons. Chez eux, les saisons n’existaient pas, ou plutôt, c’était la même saison toute l’année. Les êtres et les plantes naissaient, vivaient longtemps et mourraient pour renaître à nouveau dès qu’ils avaient disparu, sans dépendre d’un changement de climat qui d’ailleurs n’arrivait jamais. Cet éternel printemps-automne était même un peu monotone.

Bref, nos lutins étaient ravis de trouver un soleil radieux au-dessus de la prairie dans laquelle ils avaient atterri.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Après avoir fait un rapide tour d’horizon pour s’habituer à ce nouvel environnement, ils sortirent de leur escargot. Les brins d’herbe grasse leur bouchaient bien un peu le chemin mais ils offraient par ailleurs l’avantage de garder toujours une goutte de rosée dans le creux de leur tige, ce qui permit à nos voyageurs de se désaltérer en chemin. Quand vraiment une brindille leur barrait la route ils faisaient passer l’escargot devant et il applanissait le passage pour eux.

 

La première fois qu’ils se trouvèrent nez à nez avec un régiment de fourmis, ils ne furent pas rassurés mais ils se rendirent vite compte que cette compagnie de transport ne s’intéressait pas à eux, toute occupée qu’elle était à porter d’énormes quantités de provisions jusqu’à son nid. Ils virent encore nombre de personnages étranges vivant à ras terre qui vaquaient à leurs occupations; des criquets, des faucheux, des pucerons, des coccinelles qui mangeaient les pucerons, ce qui les troubla fort car sur leur planète tous les animaux sont végétariens et ils n’avaient jamais vu un être en manger un autre. Ils se faisaient discrets le plus qu’ils pouvaient mais toutes ces occasions de rencontres étaient bonnes pour leur permettre de voir, d’écouter et d’essayer de comprendre ce monde nouveau pour eux.

Comme on sait déjà, ils étaient très doués pour apprendre les langues étrangères et en arrivant en lisière de la prairie, ils avaient déjà assimilé suffisamment de mots pour comprendre les divers langages des animaux terriens rien qu'en écoutant ceux qu'ils avaient croisés sur leur chemin. Comme quoi c'est important de bien écouter, on apprend bien plus vite les choses...

Ils furent soudain surpris par un bruit sourd qui provoqua sous leurs pieds comme un tremblement de terre et une odeur curieuse arriva à leurs narines. Ça n’était pas franchement irrespirable mais c’était tout de même fort et assez désagréable. Ils se dirigèrent vers l’endroit d’où leur semblait provenir l’odeur incommodante, et après quelques touffes d’herbes ...

- Trop fraîche ! entendirent-ils.




 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



Ils se retournèrent et se trouvèrent nez à nez avec une bestiole bizarre qui poussait une grosse boule en la roulant devant elle. C’était un bousier. Trop tard pour se cacher, il les avait vus et c’est lui qui avait lancé la conversation le premier.

- Trop fraîche ! répéta-t-il.

Le bousier n’avait pas l’air méchant ni surpris de voir des inconnus dans sa prairie. Ils se résolurent donc à lui répondre.

- Bonjour, animal. Qui es-tu ? Et que roules-tu ainsi devant toi ?

- Je suis Hector le Bousier, répondit l'insecte. Je roule la bouse... D'où sortez-vous donc pour ne pas savoir ça ? Vous n'êtes pas de la prairie vous !...

- Non, dit Montreur d'étoiles, nous venons d'une autre prairie, très loin là-haut, fit-il en tendant le doigt vers le ciel.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- Là-haut ? fit le bousier en levant les yeux. Ben... mais, là-haut, il n'y a rien ! A part des lucioles qui clignotent.

- Des lucioles, c'est quoi ? demanda Gourmette. Est-ce que ça se mange ?

- Ha, ça non ! fit le bousier, vous n'êtes pas au courant, c'est des bestioles qui marchent à l'électricité. Elles restent allumées des nuits entières en été, posées dans l'herbe, et puis après, on ne le voit plus, elles s'envolent pour leur voyage de noce, là-haut, jusqu'à l'année suivante paraît-il... Bon, ben c'est pas tout ça qui va rouler ma bouse, hein ? Excusez-moi, j'ai du boulot ! Au revoir M'sieurs dames... Trop fraîche, je vous dis...

***

C'est cette grosse boule qu'il roule qui sent si fort, dit Magibus, une fois le bousier parti. Qu'est-ce qu'il peut bien faire avec ça ? Ça n'est pas bien appétissant. Au fait, Gourmette, reste-t-il un ou deux haricots ? J'ai un petit creux...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

***

A vous d'imaginer la suite de cette histoire...

Mon fils ayant grandi depuis que je l'avais commencée, il n'a jamais voulu entendre la suite !... Il faut dire qu'un ordinateur avait fait son entrée à la maison entre temps !...

Jérémie Fassole... la si do !

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